Informations fallacieuses dans l’article du Sonntagsblick du 2 septembre 2018 concernant la prétendue découverte de grenades à main suisses en Syrie
Prise de position du SECO du 4.9.2018
1) Les faits tels qu’ils ont été présentés par le Sonntagsblick sont inexacts. Les recherches entreprises par le SECO et la documentation présentée par le Sonntagsblick ne permettent pas d’affirmer, comme le fait le journal, que les grenades à main mentionnées sont ou ont été en possession du groupe État islamique.
Il n’est en outre pas possible de procéder à une identification univoque de ces grenades à main sans leur numéro de série ; leur apparence laisse néanmoins penser qu’elles pourraient avoir été fabriquées par RUAG.
En 2012, le SECO avait déjà mené une enquête sur un cas semblable : une partie des grenades à main exportées légalement entre 2003 et 2004 vers les Émirats arabes unis avaient été transmises illicitement. Des informations plus détaillées se trouvent sur www.seco.admin.ch/seco/fr/home/seco/nsb-news/medienmitteilungen-2012.msg-id-46075.html.
À la suite de cette transmission illicite, différentes mesures ont été prises pour rendre le régime de contrôle suisse plus sûr et plus efficace :
- la déclaration de non-réexportation a été adaptée (précision et extension des obligations du destinataire final ; selon le volume de l’exportation, une signature du gouvernement du pays de destination est même obligatoire) ;
- les critères d’autorisation énoncés à l’art. 5 de l’ordonnance sur le matériel de guerre (OMG) ont été complétés par des critères d’exclusion (art. 5, al. 2, OMG) et, depuis lors, l’autorisation d’exporter est impérativement refusée s’il y a de forts risques que le matériel de guerre à exporter soit transmis à un destinataire final non souhaité ;
- l’instrument de contrôle du matériel de guerre exporté auprès du destinataire final (post-shipment verifications) a été mis en place afin de vérifier si la déclaration de non-réexportation a été respectée. La Suisse a déjà conduit plus de 30 contrôles à l’étranger depuis l’instauration de cette mesure.
2) Les livraisons de grenades à main aux Émirats arabes unis et à d’autres États du Proche-Orient sont refusées depuis plusieurs années. L’aspect problématique que constituaient ces exportations n’entre donc actuellement plus en ligne de compte.
L’exportation de matériel de guerre dans la région du Proche-Orient est soumise aujourd’hui à une pratique très restrictive, qui s’applique notamment à l’exportation des armes légères destinées à l’engagement militaire, mais aussi aux munitions et aux grenades à main. En vertu de l’art. 5, al. 1, let. a, OMG, selon lequel l’évaluation des demandes d’exportation doit prendre en considération le maintien de la paix, de la sécurité internationale et de la stabilité régionale, l’exportation de grenades à main dans des pays engagés militairement au Yémen (comme l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis), par exemple, n’est pas autorisée. En effet, il y a lieu de penser que ces grenades à main pourraient être utilisées au Yémen.
3) Il faut par ailleurs préciser, dans ce contexte, que l’adaptation de l’ordonnance ne modifie en rien la pratique actuelle en matière d’autorisation d’exportation vers l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et les autres pays de la coalition engagée militairement au Yémen.
Étant donné que les pays engagés au Yémen (comme l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis) ne sont pas impliqués dans un conflit armé interne sur leur territoire, le motif d’exclusion visé à l’art. 5, al. 2, let. a, OMG n’est pas applicable. Mais, pareillement, la dérogation prévue par la nouvelle modification de l’ordonnance au même art. 5, al. 2, let. a, OMG ne s’appliquerait ni aux Émirats arabes unis, qui avaient, à l’époque, effectué cette transmission illicite, ni aux autres pays de la coalition. Une demande d’exportation de grenades à main dans ces pays serait évaluée, comme par le passé, en considération de l’art. 5, al. 1, let. a, OMG (paix, sécurité internationale, stabilité régionale) et se verrait refusée, notamment au regard du conflit actuel au Yémen.
Il n’y a par conséquent aucun rapport entre la découverte de grenades à main relayée par le Sonntagsblick et l’adaptation en cours de l’OMG.